L’ombre vocale de Pierre Rapsat plane toujours sur nos contrées.
Le 20 avril 2002, l’attachant artiste verviétois Pierre Rapsat tournait définitivement, à 53 ans, la page de son existence physique, après avoir lutté de nombreux mois durant contre une maladie qui ne lui laissait aucune chance (cancer).
S’il n’a sans doute pas connu un succès à hauteur de son talent hors de nos frontières, il n’en reste pas moins un auteur/compositeur/interprète qui a marqué les esprits et les oreilles de plusieurs générations. Au point qu’en 2012, Olivier Fivet lance un projet visant à rendre hommage au chanteur des tubes aussi emblématiques que « Illusions » ou « Ensemble ».
Son mimétisme vocal avec Pierre et son implication sont à la base d’un succès presqu’inattendu. Brasero, cover officiel de Pierre Rapsat, est né. Officiel car, outre la qualité des prestations, il reçoit l’assentiment de Marie-Ange, la veuve de Pierre, et de son fan club.
Dix ans plus tard, pour commémorer le 20e « anniversaire » du décès de Pierre Rapsat, Brasero remet le couvert avec une tournée exceptionnelle par son nombre de dates, par sa mise en scène, mais aussi et surtout grâce au support d’un orchestre de cuivre de 30 musiciens (40 sur certaines dates), le Brass Band Xhoffraix.
Ce 23 novembre 2023, jour de Thanksgiving, le spectacle faisait escale au théâtre de Namur. Un cadre enchanteur pour une soirée chantée … enchantée. Pendant près de 150 minutes, Olivier et ses comparses (Michel Schyns à la basse, Thierry Vingre aux Claviers, Youssef Khelil à la batterie, Pierre Pirlet à la guitare, Laurence Mathieu au chant) se baladent au fil des morceaux ayant marqués la carrière de Pierrot.
L’introduction est assez calme, mais dès le 3e extrait, le groupe s’attaque à « Elle m’appelle », un monument sorti en 1984. Il suffit de fermer les yeux quelques instants pour faire un bond dans le temps, en arrière évidemment. Le style musical est en effet représentatif des années 80-90, mais la voix d’Olivier se marie aussi parfaitement aux intonations de l’artiste originel, dont la photo trônait encore quelques instants plus tôt sur l’écran géant placé derrière les musiciens.
A partir de ce moment, Brasero (qui est aussi le nom du 15e album de Pierre) va habilement sauter d’une époque à l’autre pour nous rappeler toutes les pépites qui sont sorties du tamis de l’ami Rapsat. « Adeu », « Cover Girl » extrait de l’excellent « Lâchez les fauves » (1982), « Passagers de la nuit ». Et oui, vous les connaissez certainement encore.
Comme vous vous en doutez, l’assistance ne se prive pas de reprendre en chœur tous ces succès qui n’ont rien à envier à certains titres qui inondent actuellement les ondes radios.
Il est toutefois temps de bousculer un peu la routine de ces chansons en proposant un duo particulier avec le fils de Pierre, Thomas Raepsaet. Connu sous le pseudo de Tar One, le rappeur propose son flow sur une version aménagée de « Pile ou face ».
Quittant la scène sur le bout des semelles, Thomas laisse Olivier reprendre le cours de la soirée avec « Aurore », un morceau issu de « Brasero » (l’album) qui lui tient particulièrement à cœur.
Tant que l’on est dans le mélo, autant poursuivre avec « Judy and cie » que Pierre avait interprété à l’Eurovision en 1976. La trotteuse semble avoir enfilé ses chaussons pour ne pas déranger un public qui est pendu aux lèvres du chanteur actuel, celui de Brasero, dont la chanson éponyme est reprise par l’assistance en mémoire de tous ces artistes partis trop tôt mais dont l’héritage musical est loin de s’éteindre. La chorale du théâtre est sur des charbons ardents. Elle ne se fait pas prier pour enchaîner avec ce « Où es-tu Julian ? » si prenant.
Vous en voulez encore ? C’est certain. Il reste encore du stock dans le coffre aux trésors de l’ami Pierrot. Les guitares sont en transe et les voix entonnent « Ecris ton nom ». On y est ! Le public est ready pour ce trésor de la chanson française : « Illusions ». Des accords magiques, une rythmique envoutante, un texte révélateur… impossible de rester de marbre en entendant ce morceau.
Juste le temps de reprendre un peu ses esprits qu’Olivier annonce une très bonne nouvelle, la tournée qui devait prendre fin (on est à presque deux ans avec ce spectacle) se prolonge d’une date supplémentaire, ce 09 décembre au Trianon de Liège. Et comme une bonne nouvelle vient rarement seule, c’est l’anniversaire du frère d’Olivier, présent dans la salle. Ce n’est sans doute pas tous les jours que 750 personnes entonnent ainsi un « Joyeux anniversaire » à votre attention.
Le concert est déjà bien avancé, mais loin d’être fini. On vous avait dit que Pierre Rapsat a marqué plusieurs générations. Mais cette fois, c’est un morceau qui n’a pas été composé par Pierrot, mais bien par son claviériste, Jean-François Maljean, qu’Oliver reprend avec brio. Cette chanson, c’est « Visage ». Jusque-là, le concert était top. Mais le retour de Thomas sur les planches, pour entonner New-York, le premier titre de son papa, sorti voici un demi-siècle, correspond à l’ouverture du rideau derrière lequel l’orchestre des cuivres a pris place. On rentre encore dans une autre dimension.
« J’attends le soleil » est une belle transition, d’autant que l’astre céleste est aussi présent dans le titre suivant, mais en version noire cette fois. Un bain de soleil(s) que l’on va prendre « Ensemble ». Et oui, Brasero n’oublie pas cet hymne à l’unité, tout comme « C’est toujours un mystère » ou ce classique, qui n’est pourtant pas de Pierre, « L’enfant du 92e ». Il s’agit en effet d’une reprise d’un morceau de Jeanne-Marie Sens. Quoi qu’il en soit, ce désormais incontournable succès n’a pas pris une ride. Mais il n’empêche toutefois pas le rideau de tomber sur la scène, au figuré bien sûr, car Oliver et ses compères n’allaient pas prendre congé du public sans ce dernier opus si représentatif de la personnalité de Pierre Rapsat, « Tous les rêves ».
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