Sous l’emprise de Mylène Farmer ! :


Mylène Farmer. © ©MARCEL HARTMANN POUR LE JDD en ce qui concerne les crédits photos.
Quand la rédaction de Confestmag est venue me chercher à la base, c’était pour m’interroger par rapport à ma passion de toujours pour Mylène Farmer et pour mon rôle dans la gestion du Mylène Farmer Fan-Club de Belgique épaulé par d’autres passionnés. Puis de fil en aiguille, on m’a demandé de développer des sujets sur l’actualité musicale, ce que j’ai réalisé avec plaisir sans savoir qu’un jour j’allais avoir la chance d’être adopté par deux autres grandes familles, celles de Confestmag et de Top-Artist. Après avoir défendu des artistes et des modèles depuis des mois, je reviens aujourd’hui à ma passion première, celle de Mylène Farmer à l’occasion de la sortie de son dernier album « L’Emprise », un album arrangé par Wookid, plus connu sous le nom de Yohan Lemoine et une fois de plus ce n’est pas Laurent Boutonnat qui a été consulté pour mettre en musique les textes de Mylène Farmer, permettant à une artiste qui n’a plus rien à prouver d’évoluer en ne se reposant pas sur ses lauriers. Bien entourée pour cette nouvelle aventure, Mylène Farmer a pu également compter sur la collaboration d’Yvan Cassar qui pour la première fois prête son savoir-faire à cette nouvelle oeuvre musicale après avoir accompagné Mylène Farmer sur scène, Moby l’autre complice depuis de nombreuses années depuis leur duo « Crier la vie » et Aaron le tandem qui monte qui monte depuis leur tube planètaire « U-Turn » qui servait de bande-son au film « Je vais bien, ne t’en fais pas », avec entre autre Kad Merad dans le rôle principal. Comme cela fait déjà quatre longues années que nous n’avions pas pu avoir de nouvelles fraîches de Mylène, si ce n’est pas le nombre important de rééditions que l’on doit à son ancienne maison de disques Universal, il fallait bien se douter que l’artiste aurait des choses à dire et à dépeindre avec toutes les abominations et catastrophes qui nous sont arrivées pendant son absence. A l’écoute de son nouvel d’album, ce qui nous vient d’emblée, c’est cette réaction, mais mon Dieu qu’elle a bien fait de suivre Pascal Nègre pour se rallier à Sony Music en 2018 car très sincèrement il y a peu de maisons de disques aujourd’hui qui donneraient à leurs artistes mêmes en bonne grâce, l’accord de réaliser un album ovni comme l’est , « L’Emprise » car musicalement c’est digne des grandes productions comme savait les faire le groupe Queen à l’époque avec des albums tels que « A night at the Opera » et « Innuendo ». Mylène Farmer dont la réputation n’est plus à faire prolonge sa mise à l’écart avec cette volonté de créer pour faire un tube, et ici très sincèrement même si des titres se dégagent déjà et qu’ils feront assurément un carton, on sent que la volonté de Mylène Farmer et des personnes qui ont travaillé sur ce nouvel opus, est de mettre la voix de l’artiste en valeur pour pouvoir écouter plus que jamais ce qu’elle a à nous dire et très sincèrement celles et ceux qui ont toujours mis le doute sur la qualité de sa voix, doivent prêter une oreille forte sur les 12 nouvelles chansons, tant l’audibilité n’a jamais autant été mise en valeur pour le plus grand plaisir de l’auditeur. Si l’on tente de rattacher « L’Emprise » à d’autres créations artistiques de Mylène Farmer, on peut sans aucun doute associer son nouvel album à « L’autre », une oeuvre qui faisait ressortir tout le désenchantement que Mylène Farmer portait sur une époque, et ce nouvel opus dispose du côté obscur de la force Farmer qu’on lui a connu à ses débuts et qui a marqué la trilogie des trois premiers albums avant une envolée pop-rock avec « Anamorphosée », née de l’envie de Mylène Farmer de fuir la notoriété devenue trop pesante dans son propre pays et surtout de digèrer l’insuccès du premier film de son comparse Laurent Boutonnat, incompris à l’époque mais réhabilité aujourd’hui. Après cette parenthèse , retour à une forme d’introspection avec l’album « Innamoramento » grâce auquel Mylène Farmer poursuit son envie de se dévoiler toujours plus et de nous faire partager aussi des volets tragiques de sa vie, tout en mettant un nouveau siècle à l’honneur, qu’elle aurait voulu prometteur mais qui aujourd’hui doit profondément la désenchanter tout comme elle l’exprime dans « L’Emprise ». Après 6 longues années d’absence, l’artiste reviendra ensuite avec « Avant que l’Ombre », un album qui respire le bonheur d’être aimée mais pas uniquement de son public, mais d’un seul homme. S’en suivra « Point de Suture » qui est la synthèse parfaite de ce que le tandem Farmer-Boutonnat a réussi à mettre sur les rails depuis des années. Après une nouvelle tournée triomphale des Stades, Mylène Farmer fait sa première infidélité artistique à Laurent Boutonnat et lui préfère des pointures telles que RedOne, Moby et Archive pour l’accompagner pour la suite de sa carrière discographique avant de retrouver Laurent Boutonnat à la barre avec Monkey Me, qu’elle délaissera à nouveau lors des enregistrements d’Interstellaires et de Désobéissance.
Si l’on se penche sur le dernier album dont le titre est bien inspiré de l’emprise présente dans les relations amicales et amoureuses où le libre arbitre et la libre-pensée sont mis à mal, avec en passant un message fort pour les victimes, et son évolution musicale, on peut d’emblée en déduire que si Mylène Farmer change d’habillage musical, elle garde les thèmes qui lui sont chers et l’on le ressent directement dès l’écoute de la première chanson « Invisibles », un hommage à ces anges disparus qui nous manquent cruellement mais qui veillent encore sur nos vies car l’amour est plus fort que tout, le tout emballé dans une belle envolée symphonique digne d’un film. Vient ensuite le tube apéritif qui a lancé l’album, « A tout jamais », très largement inspiré par les mouvements « Me too » et tout comme notre compatriote Angèle, Mylène Farmer balance les porcs du monde entier grâce à une verve dont elle a le secret, et pour la seconde fois de sa carrière utilise le terme Fuck qui leur sied si bien. Retour à de superbes harmonies symphoniques avec « Que l’aube est belle », le « C’est une belle journée » de 2022, avec une Mylène Farmer qui face au constat déplorable qu’elle est bien obligée de faire par rapport à l’état désastreux du monde, irait bien se coucher, tout en lançant une « Bouteille à la Mer » en guise de conclusion de l’album avant les deux surprises acoustiques en guise de bonus, qui devrait être le nouvel hymne apte à se greffer sur « Désenchantée » et à notre humble avis, ces deux chansons seront désormais indissociables car en des termes différents, elles sont les témoins d’une bien triste époque épique. Heureusement l’espoir renaît avec « Rallumer les étoiles », le « XXL » de 2022 qui met en valeur l’amour et son besoin, dont l’un des mérites est de nous faire avancer sans basculer dans la nostalgie de tout ce qui est derrière nous. De grande culture, Mylène garde une passion intacte pour le cinéma avec « Rayon Vert », un titre qui pour la première fois depuis longtemps n’est pas de sa plume, mais de celle d’Aaron, très probablement inspiré par le roman de Jules Verne que l’on décrit comme sentimental et qui nous conte les aventures d’Helena Campbell qui tente d’échapper à son mariage avec l’ennuyeux scientifique Aristobulus Ursiclos et qui ne veut pas se marier sans avoir aperçu le Rayon Vert qui si l’on se base sur les légendes écossaises, permettrait aux personnes qui ont pu l’observer de voir clair en leur coeur et celui des autres. Le Rayon Vert est aussi un film d’Eric Rohmer où l’on peut observer le destin d’une jeune fille qui tente de rester fidèle à son idéal amoureux en mettant de côté toute relation éphémère qui ne ferait que de pointer du bout du doigt son sentiment de solitude. Dans la vision du tandem Farmer/Aaron, on est surtout sur un message d’émancipation doublé d’affranchissement à ne pas se laisser guider par une vie fade et tiède tant sur le plan amoureux que personnel, une sorte de réécriture de Libertine adaptée au monde moderne. Après Histoire de Fesses » que l’on retrouve sur l’album précédent, Mylène Farmer continue à pointer du bout des doigt le monde des Médias qui au lieu de mettre en lumière le travail d’une artiste, continue à appuyer là où cela fait mail, en se permettant de libres adaptations sur sa vie, bref quand on ne sait pas, mieux vaut inventer et cela nous donne « Do you know who I am ». Pour rester dans le cadre de la lecture mais nettement plus saine comparée à celle des journaux à scandales, Mylène étale à nouveau son goût pour la littérature et la poèsie des Grands, grâce au titre « Que je devienne », elle qui marche bien évidemment sur les traces de celles et ceux dont elle apprécie les oeuvres car elle est elle-même, une autrice au savoir-faire sans bornes et au passage, n’oublie pas de faire référence au fameux Jardin de Vienne que l’on retrouve sur son second album « Ainsi Soit-je ». Triste constat du monde ultra-violent dans lequel, Mylène Farmer est obligée d’évoluer tout comme nous, « Ne plus Renaître », où il est question de destruction par le feu de ce que l’on désavoue, que l’on condamne, un message fort qu’il faut très certainement entendre comme plutôt périr par le feu que d’être réincarnée et d’évoluer à nouveau dans un monde qui se déglingue, et par rapport auquel Mylène veut prendre du recul nécessaire avec un titre magnifique « Ode à l’apesanteur ». Terminons enfin avec « D’un autre part », qui est un constat de notre solitude dans un univers qui n’a pas encore livré tous ses mystères , hormis être sombre en ce 21ème siècle.
En conclusion, on peut dire que ce nouvel album de Mylène est de nouveau une valeur sûre et qu’il sera le cadeau idéal à mettre sous le sapin et même si certains le dépeindront comme morose et ovni musical, il a le mérite de ne pas rechercher la facilité immédiate, de faire réfléchir, d’être certifié de durer dans le temps car il témoigne de notre siècle qui en ce moment est loin d’être reluisant. Qui a -t-il de plus beau qu’un album qui sort des sentiers battus, qui n’est pas facile à apprivoiser directement mais qui ne vous quitte plus dès qu’il est entré dans votre vie, et surtout qui ne part pas à la conquête des tubes mais qui existe par les messages qu’il a à nous délivrer ?. La réponse est rien, et c’est pour cela qu’il faut l’acquérir sans hésiter une seule seconde.