Le retour divin de Depeche Mode ! :


Crédit photo : Anton CORBIJN
Difficile de s’imaginer que désormais Depeche Mode ne se conjugue plus qu’à deux et pourtant il va falloir s’habituer à ne plus voir Andy Fletcher, aux côtés des deux principaux piliers du groupe que restent Martin Gore et Dave Gahan, que l’on peut remercier d’avoir tenu bon en dépit du sort cruel qui venait de s’acharner sur eux d’avoir mené ce 15ème projet à bien pour le plus grand bonheur du public, tout en repartant en tournée. En effet comme le chantait si bien Queen, the Show must go on et il aurait été dommageable d’avoir à se priver d’un groupe qui a marqué l’histoire musicale, même frappé par une disparition tragique d’un Andy Fletcher qui ne se faisait pas remarquer et qui restait toujours très discret, de sorte que l’on avait toujours l’impression que depuis des années le groupe n’était plus constitué que d’un duo et pourtant sans ce troisième larron, bien difficile d’imaginer la survie du groupe car sans l’intervention d’Andy Fletcher, pas mal de projets auraient avortés car on le sait Dave Gahan et Martin Gore ont toujours fait preuve de relations semant le chaud et le froid, et lors de la conception d’une nouvelle oeuvre discographique, il fut souvent bien difficile de mettre les deux hommes d’accord que ce soit par rapport à la direction musicale à prendre, que par rapport à qui allait faire quoi sans oublier quels seraient les morceaux à garder ou pas, mais heureusement Andy Fletcher a toujours été présent pour remettre l’église au milieu du village et réussir à ce que les deux partenaires amis/ennemis en reviennent enfin à la raison pour le bien du groupe et surtout du public, on peut donc dire qu’Andy Fletcher a toujours été l’homme qui a pu canaliser les tensions tout en assurant la survie d’un phénomène musical.
Alors maintenant qu’il n’est plus de ce monde, Dave Gahan et Martin Gore n’ont plus d’autres choix que de mettre leurs différents de côté, s’ils veulent que le groupe désormais survive à la disparition de l’un de ses membres et même si Andy Fletcher était présent lors de l’enregistrement de ce nouvel opus, c’est bien à deux que Martin Gore et Dave Gahan ont statué sur ce qu’ils allaient pouvoir en faire afin de le sortir de l’ombre car mine de rien voilà déjà six longues années que le groupe ne s’était plus manifesté, lui qui avait pris pour habitude de ne pas laisser s’écouler plus de quatre années entre la sortie de deux opus, mais bien entendu à l’image de nombreux artistes Depeche Mode a été contraint de composer également avec le confinement lié à la pandémie, mais pas que car sur le plateau de Taratata lors de son passage en ce 24 mars 2023, Martin Gore n’a pas hésité à avouer que l’accouchement de Memento Mori, emprunté au latin et qui signifie en gros Souviens-toi que tu vas mourir, ne s’est pas fait sans douleur et que pour la première fois de sa longue carrière, l’homme le plus impliqué à l’écriture des textes, a souffert de l’angoisse de la page blanche et s’est retrouvé contraint de demander du renfort à Richard Butler, l’un des membres des Psychedelic Furs, et pour la première fois l’histoire du groupe allait s’écrire en partie à quatre mains.
Au départ, le soutien se devait d’être de courte durée et Richard Butler s’est contenté de donner des pistes à explorer, ainsi que des bribes de paroles et de morceaux, mais Martin Gore séduit à décidé d’aller plus loin en continuant de poursuivre l’expérience créative avec son sauveur de fortune, et pensant dans un premier temps que cette collaboration pourrait donner naissance à un projet parallèle, c’est tout de même pour le propre compte de Depeche Mode que Martin Gore a demandé à Richard Butler, si le fruit de leur travail pouvait être utilisé afin de faire avancer ce 15 ème album dans son ébauche. Le titre de l’album n’a pas directement été choisi en hommage à Andy Fletcher, car il raisonnait déjà dans la tête de Martin Gore au moment où le groupe était encore un trio, mais au moment de commencer Memento Mori, Martin Gore est à l’aube de ses 60 ans et est hanté par la mort car il est frappé par deux deuils survenus à des personnes proches âgées de cet âge de référence. Cet état d’esprit sera très certainement l’une des causes d’une grande difficulté à élaborer ce dernier album studio.
Bien entendu avec la disparition d’Andy Fletcher, ce qui a été finalement élaboré , sonne de façon différente aujourd’hui et bon nombre de textes prennent ici un sens différent, merveilleusement servis par la voix imparable d’un Dave Gaham en pleine possession de ses moyens, même amputé d’un frère d’arme et d’un compagnon de musique. Niveau ambiance, on l’imagine aisément on ne se trouve pas sur la Croisière s’amuse et on ressent que tout cela transpire la disparition et la noirceur, le tout englobé par des mélodies tourmentées baignant à la fois dans des atmosphères métalliques mais également de cordes sans oublier les synthés qui ont fait la renommée de Depeche Mode et de nombreux nouveaux titres ne sont pas sans nous remémorer les belles années du groupe, on pense notamment à People Are Good, Never Let Me Go ou encore Don’t Say You Love Me, et l’on sent également que Dave Gahan qui parallèlement à Depeche Mode, évolue aussi avec le groupe Soulsavers, profite de son incursion au sein d’un autre projet musical pour en faire bénéficier son groupe phare d’origine. Bref à l’heure où U2 surfe sur la carte de la facilité et peine à sortir de longues années de silence tout en restant de bonne facture, on ne peut que s’incliner devant Depeche Mode qui nous revient avec un nouveau projet qui lui-même sort de l’ombre avec les difficultés que l’on sait, tout en restant un groupe phare qui parvient toujours à produire des albums de bonne facture et ce nouvel album ne fait pas exception à la règle.
Souhaitons que l’engouement manifesté par le public à l’écoute de Memento Mori, rien qu’en Belgique au niveau de la Fnac, les rayons furent vidés en moins de temps qu’il ne faut pour le dire, et les concerts à venir, puissent transmettre à Dave Gahan et Martin Gore, l’énergie nécessaire pour une 16ème histoire des aventures de Depeche Mode, plus lumineuse très certainement car le temps aura fait son oeuvre, même si le souvenir d’Andy Fletecher restera gravé à jamais, d’ailleurs comment pourrait-il en être autrement…